Orwell et son « 1984 », c’était le bon vieux temps
Avec l’avènement des sauvegardes à distance sur le nuage iCloud, des iPads, des iPhones, des iPod, des aïe, aïe, aïe de tous bords, on était arrivé à un tournant. Le moment où l’on ne pourrait plus répondre aux questions « As-tu cherché les enfants ? » ou « Tu te souviens qu’on est attendu ce soir chez les Duschmoll ? » par « Euh, non, j’ai oublié. » Les rappels enregistrés, les agendas électroniques, les téléphones portables « intelligents » se chargeaient de nous rappeler tout ce que notre condition de terrien de base aurait pu laisser de côté. Les achats dans une grande surface ? Pas de problème, un clic sur l’écran et la liste de courses s’affichait.
Aux caisses, à saisie automatique, l’employée persistait à demander par habitude « Vous avez la carte ? »
Bien sûr qu’on avait « la carte » - « Parce que je ne suis pas fou ! » comme le proclamait la publicité d’un supermarché de l’électronique -, elle donnait droit à des points à convertir en espèces. La caissière continuerait de poser la question jusqu’à épuisement de la génération née avant l’avènement de cette technologie, ces gens de plus en plus âgés, qui tablaient encore bêtement sur leur mémoire interne, celle qu’ils avaient obtenue il y a si longtemps, à la naissance. Quand, à la question de routine, on répondait « Non », on pouvait sentir le regard de reproche de la dame. On n’était pourtant si vieux, pas au point de méconnaître « la carte ».
Vous vous demandiez qui vous étiez ? Il suffisait d’interroger « Le nuage ». En analysant vos achats, vos contacts, vos habitudes, il dressait de vous un profil plus précis, plus fidèle, plus objectif que tout ce que vous aviez imaginé à votre sujet.