La Cour des miracles

Le Strip s’est transformé en une Cour des miracles du XXIe siècle. Sous des attirails de Mickey, de cyclopes ou de Robocops bardés de morceaux de vieilles carrosseries se dissimulent des laissés-pour-compte du système qui se déguisent dans le but d’amuser les riches. Les photos, tout sourire, se négocient un dollar. Au pied d’une passerelle, des effeuilleuses emplumées de rouge, style Folies Bergères en soldes, sourient de toutes leurs fausses dents. De jeunes danseurs de hip hop mexicains exécutent des culbutes devant le Forum du Caesars Palace.

Les touristes se prennent en photos devant les fontaines romaines. Accroupi derrière un jet d’eau, un loqueteux, pieds nus, pantalon retroussé, tente de récupérer dans le bassin des pièces d’un ou deux cents.

Il est très rare de croiser une personne sans tatouage. Têtes de mort, serpents, symboles chinois et signes ésotériques sont les scarifications que les tribus urbaines civilisées ont adaptées des peuplades primitives. La gente féminine, fausses blondes, fausses lèvres, faux sourires, vrais Chanel, déambule, nonchalante, entre la sortie des hôtels et l’entrée des boutiques Haute Couture.

Dans les restaurants, pas de soucis de rester sur sa faim. On a commandé un Châteaubriand pour Serge et moi. Le plat qui est arrivé aurait suffi à nourrir une famille de six personnes affamées. La quantité compte souvent plus que la qualité. Ceux qui ne désirent pas perdre de temps, ou manger seuls, commandent leurs plats directement à la table de poker.

Las Vegas n’est pas la capitale de la plus judicieuse exploitation des ressources. La température est assez idéale dehors, mais la climatisation omniprésente ne nous permet pas de garder short et T-shirt à l’intérieur où, même en pullover et pantalon, on gèle dans une atmosphère réfrigérée. Dans les salles de bains, un carton - Efforts de développement durable - invite les hôtes à déposer au sol les serviettes s’ils souhaitent voir changées. Merci de suspendre les serviettes que vous désirez continuer à utiliser. Je n’ai jamais constaté qu’une serviette suspendue ou non, n’ait pas été remplacée après une demi-journée d’utilisation. A chaque passage à la piscine on reçoit deux grands linges de bain.

Même au bord de l’eau, la musique diffusée par haut-parleurs couvre le pépiement des oiseaux, spécialement importés au milieu du désert pour le bucolique bonheur des vacanciers. Le seul endroit relativement calme est l’intérieur de notre chambre quand nos voisins sont absents, jusqu’à quatre heures du matin. 

Comments

[MIK.22]

En tout cas, profitez bien tous les deux de ces quelques jours hors de ce monde...

[MIK.22]

J'ai aimé particulièrement le "pépiement des oiseaux" qui m'a fait penser à ce fameux petit-déj à la piscine du Bellagio...Dommage que nous n'y soyons pas ensemble cette fois !