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16 avril 2015

Partie 3 : Aux tables de jeu

   

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Les perdants expliquent souvent pourquoi ils auraient dû gagner la main. Personnes ne les écoutent, mais plusieurs acquiescent. Un cow-boy buriné à rouflaquettes rousses, avec en main une dame et un dix, reraisa un jeune Asiatique fier et fringuant. Il toucha sa suite et gagna un pot qui avait enflé. L’Asiatique prit les joueurs à partie :
-    C’est  dingue de jouer aussi mal !
Quelques hochements de tête.
Une dame, solidaire depuis plus d’une heure des malheurs de l’Asiatique, venait de s’en aller. Le perdant inondait la table de tout le mal qu’il pensait de Rouflaquette. Ce dernier n’appréciait pas :
-    T’aimes pas mon jeu ? Chacun a le droit de risquer ses jetons comme il veut !
-    Ouais, j’étais devant. C’était un fold.
-    J’aurais perdu !
-    Continuez à jouer comme ça.
-    Vous n’avez pas eu de chance, dit Rouflaquette. Je me demande ce que fait votre femme ou plutôt... je devrais
dire votre coach.
A partir de là, Rouflaquette n’arrêta plus de commenter les coups du jeune qui continuait de se plaindre :
-    Ce type qui sait pas jouer, il va me rendre fou.
-    Mais c’est mon but, répondit tranquillement Rouflaquettes.

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Chacune des répliques faisait sourire le coin des rides. 

   Un matin, une fois n’est pas coutume, deux personnes à la table avaient commandé un thé. Le service était particulièrement lent. Une des demoiselles servant les cocktails à la salle de poker, ces demoiselles avec de gros seins, une minijupe et un suave sourire que l’on récompense d’un jeton d’un dollar, a fini par délivrer les thés et son sourire puis elle est repartie vers d’autres tables.
-    Mais, je voulais un thé sans lait, s’est exclamé un des joueurs.
Un jeune naïf a proposé d’échanger :
-    Tenez, je ne l’ai pas encore touché.
L’autre s’est empressé de lui tendre son gobelet, et a siroté le breuvage. Le jeune a tout de suite compris son erreur.
-    Mais, vous aviez goûté ?
-    Oui, répondit l’autre en continuant la partie.

   Le temps, c’est de l’argent. Pour en perdre ou en gagner un maximum, des joueurs mangent à la table de jeu sans interrompre leur partie. On leur livre sur une table roulante un menu choisi sur la carte d’un des restaurants voisins. Quand je suis arrivé un matin à huit heures, trois joueurs sur neuf étaient en train de déjeuner, poursuivant la session entamée la veille. Omelettes, pommes rissolées, french toasts au sirop d’érable, barquettes de riz tiède aux crevettes ou combo poulet, the game must go on. Serge et moi, nous options pour de vrais restaurants. Les heures accumulées, comptabilisées sur une carte, la Player’s card, étaient converties en bons de restaurants.
   Devant le comptoir de la salle, je me suis adressé au responsable, un type suant l’ennui, vieux, revêche, qui, à dix-huit heures, entamait sa journée.

Poker tatoué-    Combien ai-je sur la carte ? ai-je demandé.

Il glissa dans l’ordinateur le rectangle de plastique  violet qu’il ressortit avec une moue dépitée.
-    Oh, vous n’avez rien, cinquante-quatre dollars.

   Cela donne une idée du temps que doivent passer les gens aux tables. A deux dollars l’heure, cela représentait vingt-sept heures de jeu.

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