Japon IV Le massage

Je me suis offert un massage de trente minutes à l’hôtel avant de partir ce matin. Il paraît que l’on se sent mieux après.

La cabine est petite avec une banquette. J’allais enlever mon tee-shirt quand la masseuse, qui ne parlait pas anglais, a fait de grands gestes paniqués qui se comprennent dans toutes les langues : il ne fallait pas. Ce n’était pas une fille canon, elle devait avoir septante ans et mesurer un mètre cinquante, mais elle avait un charmant sourire édenté et de l’expérience. Elle recouvrit mon corps d’un drap, me secoua les bras dans tous les sens et commença à me malaxer le dos et la nuque. Elle m’enfonça son coude entre les omoplates et juste au moment où l’allais me mettre à hurler, elle se mit à me transpercer les muscles des cuisses. Je m’efforçai d’avoir une attitude de samouraï et de ne rien laisser paraître.

Après quelques heures, voire jours, tout s’arrêta. Où étais-je ? Dans une autre dimension ? Un monde parallèle ? Ma montre, victime du traitement, devait s’être arrêtée car elle indiquait qu’il ne s’était écoulé qu’une petite demi-heure ridicule. La dame alla se saisir d’un objet. Instinctivement je rentrai la tête dans les épaules. Elle me présenta un papier sur lequel était écrit 3300 yens. Je réalisai que le bas de mon corps se levait, aussitôt suivi du tronc et de la tête. Un coup d’œil sur la table de massage me confirma qu’aucun élément de mon anatomie n’y demeurait. Je payai puis mes jambes obéirent à l’ordre donné par mon cerveau les enjoignant de quitter les lieux.

Je confirme qu’après un massage, quand tout s’arrête, on se sent beaucoup mieux.