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2 août 2021

Balade au Jura III

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Notre mentor, Bastian, n’est stressé ni par les horaires, ni par la pluie, ni par les contretemps. Il a tourné le dos aux ambitions matérielles et trouve son bonheur en parcourant vallons et montagnes pour accompagner des groupes de marche et d’aquarelle. Architecte-paysagiste et guide de moyenne montagne, il connaît le nom et la toxicité des plantes, distingue les traces d’un renard de celles d’un chat sauvage alors que je n’ai même pas repéré de traces, reconnaît une buse à sa queue en M ou en U, je ne sais plus, et nous rend attentif au chant d’un geai dans le feuillage d’un merisier. Je lui dois d’avoir pu indiquer « Érable sycomore » en regard d’un croquis pour éviter qu’on le confonde avec un vulgaire arbre. Crinière blonde en bataille, il bat la campagne, infatigable. Derrière son tempérament d’ours solitaire se cache un nounours attentionné, prêt à redresser d’un trait de crayon une perspective bancale. Il ne laisse jamais traîner un papier, ni une couenne de fromage au-dessus de 1300 mètres pour éviter qu’un renard par l’odeur alléché ne vienne déranger maître chamois. Il porte une bonne partie des pommes, carottes et barres de céréales des pique-niques, planifie les départs à 9 heures en demandant « ça vous va ? », ce qui est toujours le cas, et se réserve toujours la plus mauvaise chambre même si, cette année, je lui ai volé cet honneur. Il nous montre en cinq minutes comment s’y prendre pour réaliser une aquarelle qui nous demandera une bonne heure. Le truc : aller à l’essentiel, cligner des yeux pour bien différencier les tons clairs des tons foncés. Très important la lumière. Et son mantra : « il faut savoir s’arrêter à temps, un dernier coup de pinceau peut être celui de trop. » 

     Je compte les participants, ça fait six et l’on était sept. Le nom de la septième me revient : Sylviane qui est la plus discrète. Elle disparaît dans sa chambre sitôt le seuil de l’entrée franchi au retour des balades. On s’était déjà rencontré dans d’autres stages, elle admire mes capacités de dessinateur, ce qui en soi est une qualité que j’apprécie chez elle. Première au lit, elle est la dernière levée. Grâce à elle, je ne suis pas systématiquement le dernier à arriver au petit déjeuner. Elle est un peu moins marcheuse sportive que les autres, ce qui m’arrange. J’ai l’impression que le groupe se traîne quand je le regarde, mais depuis l’arrière sur les routes avec elle, on doit presque courir pour le rattraper. 

     À la fin d’une après-midi, dans un bus postal de la Gruère à Saignelégier, tous les passagers entendaient le chauffeur, accent jurassien à couper au couteau, discuter avec son clone, un copain, sans doute un ancien chauffeur de la compagnie. 

-    Leur tournée débile, 7h 19h, 4 heures de pause au milieu, tu veux foutre quoi à Saignelégier ? tu te fais chier vingt kilomètres pour rentrer.

-    Ils ont des contrats de mérde, y zont trouvé personne pour la tournée.

-    Ouais, ils te font un contrat à 100% pis l’année d’après, t’es à 80. Y font c’qui veulent.

-    Le dernier qui est parti, il a fait magasinier, on dit logisticien maintenant, mais je dis toujours magasinier. 

Une famille vient de descendre au camping.tempImagepX4hAs

-    T’as vu ces illuminés, y vont s’prendre la foudre dans leur tipi.

     Le bus repart.

-    J’ai un copain, il est démerdé du toit de c’bâtiment là-bas, direct.

-    Moi, j’en connais un qui est démerdé du toit en 1972, chez Camiiille Bloch. Un jeune. Ça te change la vie quand tu deviens paraplégique.

     On arrive à la gare de Saignelégier. Coup de klaxon.

-    Y font chier ces bagnoles devant.

-    C’est les Belges, ceux qui nous ont dépassé. Ils prennent leur friteuse avec eux ou bien, ces illuminés ?!

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