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22 décembre 2023

Au temple

 

J’arrive aux abords du bâtiment et je tombe sur une manifestation. Plutôt sur une signalisation routière annonçant à une extrémité de la rue : « Manifestations » et à l’autre extrémité : « Police ». Tant pis, un samedi matin n’est pas le meilleur moment pour circuler. Devant le temple, le parking est immense, mais la foule de voitures également. Des hommes seuls, des couples, mais aussi des familles. 

La procession des fidèles qui entrent et qui sortent ne tarit pas. Les fidèles tirent et poussent d’immenses charriots qu’ils vont couvrir d’offrandes. Pas de paniers à l’intérieur, seuls ces chars à bœufs sont à disposition pour transporter sa collecte. Je me contente de mon sac. Ma fille désire un élixir que je n’ai trouvé nulle part ailleurs : un sirop Morand à la vanille. J’en avais repéré à la noix de coco, au pamplemousse, à la framboise, aux abricots du Valais ou aux abricots sans label, à la réglisse, à la menthe, enfin une vingtaine de sortes chez Manor ou à la Coop, mais à la vanille, aucun. La vanille se mérite, elle ne se trouve que là, chez Aligro. Tu verras c’est facile, premier étage vers le milieu à gauche. Je repère des savons liquides, des rangées de tablard de savons aux amandes, à la vanille, au PH neutre, pour les mains, pour le corps, des décamètres de savons, puis tous les produits imaginables ou pas imaginables, du riz blanc, noir, jaune, à longs grains, sauvage, domestique, thaï, basmati, de Chine, d’Italie, des ustensiles de cuisine, des pâtes longues, courtes, en tortillons, creuses, pleines, fines, larges, dont les noms finissent en -i, cannelloni, tortellini, spaghetti, serrées par des feuilles de plastique, histoire que l’on ne se contente pas d’un seul paquet. J’avise un guide spirituel grâce à son air ennuyé et le badge de prêtre Aligro épinglé à son revers.

-    Les sirops, ouais, ça doit être en bas avec les boissons et l’alimentation.

L’escalier est invisible, mais je découvre à une cinquantaine de mètres des ascenseurs qui, avec leur plancher en bois, ressemblent à des étables mobiles et font leur boulot d’ascenseur, transportant le troupeau d’en haut en bas puis si on les retrouve, le ramène à l’étage.

En bas, à perte de vue, de quoi nourrir plusieurs cités affamées. Il y a de telles quantités que les adeptes se contentent d’entasser les marchandises sur les charriots sans précipitation. Les montagnes de fromage, les tonnes de charcuterie, les morceaux de viande ou les décamètres d’agrumes sont inépuisables. Pas moi. Je tourne en rond. Je ne trouve pas le sirop et l’angoisse de ne plus retrouver la sortie se fait de plus en plus présente. Si je m’en sors, avec ou sans sirop, je me promets de ne plus jamais me replonger dans un tel abîme. Tiens, je tombe sur du lait, je voulais justement acheter du lait. Il y a des berlingots sur une dizaine de mètres. Je vais voir de plus près. Ce sont des emballages de crème. Des emballages sont disposés de l’autre côté de l’étal, mais de crème allégée. Le lait, je finis par l’apercevoir très loin, un mur de lait qui tel un torrent emporterait tout sur son passage si la barrière cédait. Je m’éloigne. Un dieu doit veiller car à ce moment, un miracle survient : je tombe sur les sirops Morand. Je saisis une bouteille. 

En emboîtant le pas à une procession, je parviens à m’élever jusqu’à l’étage de la sortie. Je me trompe de caisse, car selon son statut de Grand-Prêtre, aumônier ou simple fidèle, chacun doit emprunter le chemin destiné à sa caste. Le moine bienveillant qui m’accueille accepte néanmoins d’encaisser ma participation au culte de ce jour. 

Je suis de retour à l’air libre. Au sortir du temple, mes yeux s’habituent à la lumière nouvelle. Le sentiment d’oppression s’amenuise, j’ai ramené le trophée, la messe de ce matin n’aura pas été vaine.

-    Tiens Leah, mais s’il te plaît, ne m’envoie jamais plus dans un endroit pareil.  

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Commentaires
P
Merci, ça fait plaisir
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D
Excellent ! J'adore !<br /> <br /> <br /> <br /> Bravo, Edna
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