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5 août 2022

Chroniques persanes XVII : Tapis et marquèterie

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Dans son atelier, derrière la place Naghch-e Djahan, le marchand de tapis avec son sourire vissé sur une face ronde, a une tête de marchand de tapis. 
-    Bienvenue, prenez place. Nassim va vous apporter du thé. Excusez la climatisation qui ne fonctionne pas.

Cela n’a pas l’air de gêner les trois dames accroupies en tailleurs devant leur métier à tisser. Deux travaillent ensemble, la troisième seule. Elles sont contentes d’avoir un travail, leur patron leur concède de quoi survivre, peut-être même un peu plus car les prix et conditions sont correctes ici, nous a informé Leyla.

Nassim qui a servi le thé est en train de dérouler des tapis : un kilim, un Tabriz, un Ghom. Le patron commente la scène comme une série de diapositives qu’il actionnerait par télécommande :
-    Observez la finesse des nœuds, la luminosité des couleurs. Il faut sept mois à une ouvrière pour finir un tapis de grandeur moyenne, jusqu’à un an pour ceux en soie, cinq cents nœuds par pouce. 

IMG_7294Il retourne un tapis, nous désigne les petits points avec son stylo. On observe, on admire. Le propriétaire a décelé un intérêt de la part de Catherine pour un tapis aux motifs beiges et orangés. Il envoie son second en chercher une cargaison. Le colonel est également dans sa ligne de mire pour un tapis bleu azur, plus grand, donc plus cher. Les yeux du marchand brillent d’autant plus. Les dames au tissage sont payées à la fin du travail, ça ne change rien pour elles, elles demeurent concentrées sur le maniement du peigne et des ciseaux.
-    Si elles ont besoin d’argent, car c’est long d’attendre six mois ou plus, je ne refuse pas une avance, nous rassure le propriétaire avec sa tête de l’emploi.

Nassim obéit et présente des modèles par quintaux. Il déroule un tapis, le tient verticalement devant lui, puis le balance à plat sur le plancher qui se couvre de couches successives pourpre, beige, turquoise, or. Il se chargera de tout remettre en ordre après notre départ.
Un ventilateur brasse l’air, atténuant un peu la sensation de chaleur. Peut-être les dames profitent-elles également des restes du courant qui les effleurent.
On rend les tasses à thé, on remercie, et on contourne l’amas de tapis avant de remonter suer dans la rue jusqu’au bus. 

Leyla nous propose d’être déposés à l’hôtel ou d’aller visiter le musée des instruments traditionnels de musique. Bizarrement, j’ai opté pour la deuxième option. Après une courte démonstration par son ensemble, un gamin de dix-huit ans, musicien surdoué, nous a servi de guide. Parfaitement à l’aise devant nous, il a détaillé les subtilités des instruments de musique traditionnels en réussissant le tour de force de ne pas m’ennuyer. Il avait l’allure d’un jeune rasta, parlait un anglais parfait, et avait l’air de savoir tout sur tout, jusqu’à nos cors des Alpes dont il connaissait l’origine et la raison d’être. On a été copains quand je lui ai dit que le seul instrument dont je savais jouer, c’était le tennis. C’était fascinant d’écouter les explications de ce jeune geek croisé avec un vieux sage.

IMG_7377On assiste le dernier soir à une séance de gymnastique traditionnelle menée au son du tombak, une sorte de tambourin, accompagné de litanies tirées du Coran. Dans une arène appelée zurkhaneh, où la place suffirait à peine pour cinq personnes chez nous, une bonne trentaine d’hommes aux pectoraux hypertrophiés enchaînent quatre ou cinq cent pompes. Nos narines perçoivent les décalitres de transpiration qui se baladent sans retenue dans la salle. Les pahlevans, lutteurs, se relèvent alors et balancent en cercles autour des épaules des massues de dix à quarante kilogrammes chacune, quelques-uns effectuent ensuite des mouvements de jonglage comme on en voit avec des quilles. À tour de rôle, les pahlevan se lancent au centre de l’arène. Comme un derviche, chacun tourne et tourne de plus en plus vite jusqu’à être récupéré avant son effondrement. L’entraînement de deux heures se terminent par la manipulation autour des épaules de disques de métal réunis par une chaîne. Tout se déroule dans une atmosphère de ferveur et de respect mutuel, et finit par une prière.

IMG_7243Le lendemain, un grand tapis pour le colonel, un plus petit pour Catherine, qui a craqué
même si elle n’a pas la place chez elle, occupent le fond du minibus lorsque l’on quitte Ispahan. Andrea a trouvé des boîtes en marquèterie à ramener, on emporte avec nous les boîtes de nougats de l’Arménien renfrogné.

On est resté trois jours. Ispahan est belle, aérée, variée, impressionnante. On a coché toutes les cases qu’un touriste doit cocher. On part direction Kashan, ville plus discrète et plus religieuse.

 

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