Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Chroniques
Newsletter
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Chroniques
Visiteurs
Depuis la création 18 900
29 juin 2014

Dépôt de plainte

  Il y a quelques jours ou quelques heures, allez savoir, un type désœuvré en mal de distraction a eu une chouette idée : plutôt que de continuer à ne rien faire de son temps, il a ramassé un caillou et marqué tout le pourtour de ma voiture. Dommage collatéral : l’obligation de déposer une plainte à la police pour m’assurer que l’assurance entre en matière. Je cherchai sur Internet les heures d’ouverture du poste. Pas d’horaire indiqué, mais un numéro de téléphone que je composai. A la centrale, une téléphoniste me fournit, non pas les heures d’ouverture, mais un numéro pour m’en enquérir, que je composai aussitôt.

police


  Après une attente en ligne agrémentée de conseils pour assurer sa sécurité, une employée m’affirma que le poste de Renens était ouvert jusqu’à dix-sept heures trente.
—     C’est pour quoi ? ajouta-t-elle.
—     Le dépôt d’une plainte.
—    Ah ! Alors, ne venez pas (J’imaginais qu’elle voulait éviter de voir des gens se pointer deux minutes avant la fermeture du guichet) à dix-sept heures dix.

  Je découvris sur le site web de la police une possibilité de remplir une plainte en ligne. Il n’y aurait plus qu’à l’imprimer puis à passer la faire signer par un agent.

  Peu après quinze heures, mes papiers à la main, j’étais au comptoir de la police de Renens. Une secrétaire me pria de patienter : « Quelqu’un va venir » et elle poursuivit son occupation que je venais d’interrompre.
  Un policier dans un bel uniforme bleu sortit d’un local adjacent. Je l’arrêtai au moment où il passait devant moi.
—     Bonjour, c’est vous qui vous occupez de ma plainte ?
—     Pas du tout, dit-il en sortant.
  La secrétaire demanda par la porte restée ouverte :
—     Qui c’est qui prend la plainte du monsieur ?
  Une voix répondit :
—     Ils sont en patrouille.
—     Il n’y a plus personne ?
—     Si, si ! ceux qui sont r’venus.

  Un autre policier arriva.
—     Bonjour c’est pour ma voiture, elle est juste devant.
—     Ouais, faut bien la parquer ! lâcha-t-il en passant tout droit.

  Dix minutes plus tard, un type, cheveux en brosse, pistolet et matraque à la ceinture, biceps débordant d’une chemise trop étriquée sortit du local.
—     Salut Eric, monsieur attend pour un dépôt de plainte, dit la secrétaire en me désignant.
—     Qu’est-ce qui s’passe ? s’enquit le musculeux, son menton carré entre le pouce et l’index.
—     On m’a rayé ma voiture, mais j’ai déjà rédigé un formulaire en ligne.
  Il leva les yeux au ciel en lâchant un énorme soupir.
—     Ouh là là ! Mais c’est compliqué.
—     Ah bon.
—     Ouais, faut que je le retrouve, vous comprenez.
—     Mais il est là, dis-je en lui tendant les deux feuilles imprimées.
—      Oh ! C’est pas comme ça que ça s’passe. Il me faut un lien moi.
  Là-dessus, il retourna dans le bureau à côté. Quelques ahanements nous parvinrent. On l’entendit pester, puis surgirent par la porte restée ouverte des questions adressées à la secrétaire :
—     T’as déjà eu une plainte par Internet ? Tu sais comment on fait ?
—     Euh, non, mais on doit y arriver avec le code.
—     Ouais j’y suis, mais y en a 1741.
—     Celle de monsieur, c’est quel numéro ? demanda la secrétaire.
  L’idée de vérifier le numéro ne lui parut pas mauvaise. Il revint prendre note des chiffres.
—     Ils ont mis ce service, soupira-t-il, mais c’était plus simple de prendre toute la déposition.
  Il repartit vers l’ordinateur. Chacun de ses doigts épais devait couvrir au moins deux touches du clavier. Quelques soupirs plus tard, il revint à la charge.
—     Faut valider j’pense ?
—     Sûrement, répondit la secrétaire.

  Quelques minutes plus tard, il réapparut.
—     Ça s’est passé où ?
—     Je l’ai constaté au parking du Flon, mais entre Crissier, Préverenges, Lausanne, je ne sais pas exactement où s’est arrivé.
—     C’est qu’il me faut un lieu moi !

—     Alors Lausanne.
—     Vous êtes sûr ?
—     Oui, oui sûrement.
  Il repartit d’où il venait. On perçut quelques clics, de nouveaux soupirs puis une question traversa les airs :
—     Ça s’imprime ?
  Une imprimante jouxtait le bureau de la secrétaire. Malheureusement, c’était dans les deux locaux, le seul élément qui était demeuré parfaitement silencieux.
—     Euh, non, j’crois pas, répondit la secrétaire.
—     Ça d’vrait s’imprimer.
  Là elle ne répondit pas.

  Il vint vérifier par lui-même.
—     Quand on prend les plaintes directement ici, ça s’imprime.
  Je jouai la solidarité :
—     Je suis désolé, je pensais gagner du temps.
—     C’est pas votre faute qu’ils aient mis ce système. mais ça nous facilite pas les choses. Vous comprenez, faut que ce soit accepté.
  Je m’efforçai de l’encourager.

—      Pas de soucis, c’est en ordre : s’il manquait quelque chose, il y avait un avis en rouge. Je n’ai pu imprimer les feuilles que quand c’était en ordre.
—      Bon. Ça devrait marcher alors.

  Il repartit faire ses essais.
Un bruit sortit de l’imprimante. Il appela plein d’espoir :
—      Ça marche ?
  La secrétaire se leva et alla vérifier.
—      Non, ça c’est ce que je viens de lancer moi-même.

  Des bruits de chaise traînée sur le parquet, de table déplacée et d’ordinateur maltraité nous parvenaient du local adjacent. Soudain, l’imprimante se remit en branle.
  Comme s’il avait enfin eu raison d’un suspect récalcitrant, le policier bodybuildé se précipita vers l’imprimante. Il en retira deux feuillets qu’il brandit triomphalement dans ma direction.
—      Voilà, elles sont imprimées.
  Il compara les deux pages à celles que j’avais apportées.
—      Hé, constata-t-il, elles sortent exactement comme les vôtres !
  Il lu : « Dommage : raies sur les côtés et capot. »
—      Nous, on rédigerait les choses différemment, on est des professionnels, vous comprenez. Mais on a des instructions : si on peut comprendre ce qui est écrit, on accepte.
  Il apposa un tampon et signa soigneusement dans la case réservée. Au moment où il me serrait la main, je lui suggérai de venir jeter un coup d’œil à la voiture.
  Histoire de constater, me dis-je, qu’elle existait réellement.

  Je pris ensuite contact avec la Zurich Assurance pour faire un bref compte-rendu téléphonique. Une employée m’informa de la procédure :
—     Il vous suffira de passer au Help point montrer la voiture à notre agence.
—     J’ai aussi déjà déposé plainte à la police.
—      Ah bon, précisa très aimablement la demoiselle au téléphone, ce n’était pas nécessaire.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité