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21 juillet 2011

Une journée ordinaire

Mince, plutôt jeune, cheveux noirs bouclés, lunettes de soleil, le type assis au bout de la table de poker marmonne pour lui, pour les autres ou pour personne. Il se sert parfois d’une bouteille vide comme d’un micro. Même pour Las Vegas, il paraît chtarbé. Ses gestes sont saccadés et hachés comme ceux des personnages des premiers films animés. A côté de ses piles de jetons qui s’élèvent devant lui comme des gratte-ciel instables, il a installé une espèce de pharmacie d’urgence : boîtes de pastilles de toutes grandeurs, amphétamines, fioles de liquides indéterminables, divers produits euphorisants ou calmants, selon la situation, et trois ou quatre flasques de plastique coloré. Il feint d’ignorer les regards qui s’attardent sur son rayonnage. Il n’arrête pas de gagner et se confie aussi bien à sa bouteille vide qu’à des personnages invisibles ou à son téléphone portable dont un fil pend à son oreille gauche, la droite étant occupée par le câble de son Ipod. .

Las Vegas 015Les limites de la ville marquent une frontière très nette avec le reste du monde, dont des bribes parviennent parfois aux tables de jeu.
         Strauss-Kahn a été libéré.
         Ah, c’est un joueur du Main Event ?

         La famine sévit en Somalie.
         C’est où la Somalie ?

         Un ouragan a frappé les côtes du Mississipi.
         Merde ! j’avais parié qu’il frapperait la Caroline.

Les détails, comme de savoir quel jour ou quel date on vit, sont laissés de côté. Pas non plus besoin de se casser la tête pour trouver ce que l’on va faire de sa journée : poker, poker et encore poker. Eventuellement une séance de craps ou de blackjack si l’on veut une fois faire preuve d’originalité.

N’étant là que depuis quelques jours, j’ai conservé des liens au-delà des murailles invisibles de la ville. Je m’adresse à la loge des concierges :
         Puis-je poster cette carte ?
L’homme que j’ai interrompu est tout déstabilisé, il en tremble et, me désignant un groupe de personnes à cinq ou six mètres, me remet promptement à l’ordre :
         Il y a des gens avant vous.
Las Vegas 094
Je tourne la tête et j’avise la file d’attente que je n’avais pas remarquée. Pour éviter de patienter inutilement près d’une demi-heure, je quémande un renseignement auprès de son collègue chargé de canaliser les demandes :
         Prenez-vous des cartes postales ?
         Il y a une ligne avant vous.
         Oui, bien sûr mais je voulais savoir si vous vendez des timbres pour l’Europe.
         Oui, c’est quatre-vingt-dix-huit cents.
         Je sors un dollar et le lui tends avec la carte.
Il a l’air offusqué et inquiet.
         Non, non ! je ne peux l’accepter, il y a un formulaire à remplir.

J’attends les vingt minutes requises pour tendre la carte et le dollar à la bonne personne. Je me souviens d’une époque où il était plus simple de poster un envoi

 

 

 

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